Porter sa croix

Publié le par Elisa

Si quelqu'un veut marcher derrière moi, qu'il renonce à lui-même, qu'il prenne sa croix et qu'il me suive, nous dit Jésus dans l'Evangile de ce jour. Le Christ nous a aimés jusqu'à donner sa vie pour nous et finir sur la croix. De la sorte, il n'a pas supprimé la souffrance de nos vies, mais il est venu la supporter avec nous... La foi chrétienne est un message d'amour et d'espérance. La présenter de manière trop doloriste, comme on le voit parfois, est dangereux car cela peut être mal compris et conduire certains tout droit en psychiatrie.

Certains chrétiens trouvent normal de souffrir. Plutôt que de se faire aider, ils acceptent leur sort dans une sorte de fatalité naïve. Je pense à ce jeune homme qui erre sur le net pour le moment en se  présentant comme le nouveau pape, sa sainteté Léon XIV. Plus les bonnes volontés tentent de le raisonner, plus il se sent confirmé dans sa mission: la persécution est pour lui une conséquence de son imitation de Jésus-Christ.

Les homélies nous parlent  souvent de renoncement à soi pour suivre le Christ... mais rarement de la nécessité du discernement. Or, les deux vont de pair... Le renoncement à soi est une absurdité, voire une abomination, lorsqu'il est vécu dans l'absence de discernement. Nous ne sommes pas tous des Mère Teresa, des Maximilien Kolbe... ou des papes. Il n'y a pas une vocation à la sainteté, mais des vocations à la sainteté et toutes ne passent pas par le martyr.

Imiter Jésus-Christ, c'est accepter la souffrance quand elle se présente et ne pas se laisser décourager par elle, c'est poursuivre notre vocation propre même lorsqu'elle conduit à  la souffrance. Mais Jésus n'a jamais encouragé la recherche de la souffrance en soi. Jésus n'a pas marché volontairement vers le Calvaire: il cheminait pour accomplir sa mission dans le monde lorsque les hommes l'ont conduit au Calvaire. Jésus n'a pas choisi la croix: il a accepté les conséquences de sa mission. La nuance est de taille...

Imiter le Christ, ce n'est pas souffrir mais avant tout aimer car le Fils n'a pas pris chair pour souffrir mais pour aimer et rétablir l'Alliance. Ce n'est pas la souffrance qui est rédemptrice, mais l'Amour. La croix arrive lorsque l'amour donné gratuitement est refusé : c'est l'amour qui est sur la croix, pas les passions ou les péchés. Porter sa croix n'a donc rien à voir avoir se priver de plaisir ou fuir les tentations. Selon moi, porter sa croix est une invitation à aimer et à accepter que notre amour (qui est en réalité celui du Christ qui passe par nous) puisse être mis en croix plutôt qu'imposé. Ce n'est pas forcément mortifère.

Porter sa croix passe par un renoncement à soi et un détachement par rapport à ce qui n'est pas indispensable, pour pouvoir revenir à l'essentiel avec une âme nue. Mais
ce dépouillement n'implique pas de toujours penser aux autres et jamais à soi: charité bien ordonnée commence par soi-même. A plusieurs reprises, l'Evangile nous présente Jésus qui plante là la foule innombrable qui le suit pour se ménager des moments à lui durant lesquels il s'isole pour se reposer ou prier. Avant de se perdre et de donner sa vie comme nous invite à le faire le Christ, il importe de s'être trouvé: on ne peut donner que ce que l'on possède. Celui qui ne se connaît pas (cela demande du temps) ne peut se donner...

Publié dans Récolte théologique

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